11 août : escale à Qeqertarsuaq - île de Disko

Traduction d'un extrait du programme du jour : Qeqertarsuaq signifie grande île en groenlandais. C'est le nom de la ville et l'île. Le nom Disko Island a sans doute été donné par les chasseurs de baleines européens. Autrefois,  la chasse à la baleine était la source principale de revenus de l'agglomération. Aujourd'hui, la plupart des habitants vivent de la pêche. Agée de 80 à 100 millions d'années, l'île de Disko est une jeune terre si on la compare à l'île principale du Groenland d'un point de vue géologique.

11 août à 4 h 45 au salon panoramique : on a parcouru 262 milles depuis Kangerlussuaq, 111 milles depuis Sisimiut et nous sommes à 36 milles de Qeqertarsuaq où nous devons débarquer vers 9 h en principe pour en repartir vers 15 h. Actuellement, nous faisons route au 8° nord à 11 noeuds ; notre position est 68° 41’ nord et 54° 09’ ouest ; il fait 7,8° Celsius ; 44 % d'humidité ; 1009 hPa ; vent de 17 noeuds ; le soleil est déjà haut dans le ciel.

7 h 03, j'ouvre les rideaux, au loin quelque chose brille... 1er iceberg ? Je regarde plus attentivement : ils sont assez éloignés mais il y en a beaucoup. Vers l'avant, je distingue bien l'île de Disko, proche maintenant.

Aujourd'hui, le Fram n'accoste donc pas et reste au mouillage à 200 m environ du rivage. Le Ocean Nova est par contre à quai... Sa silhouette me rappelle "quelque chose" : c'est en fait l'ancien express côtier Sarpik Itiuk qui assurait auparavant la liaison entre les ports de la côte ouest groenlandaise. Son sister-ship, le Sarfak Itiuk, navigue toujours sur cette ligne. Il y a quelques années, j'avais envisagé de naviguer à leur bord tout comme j'ai toujours en tête de voyager sur le Nordic Express qui transporte passagers et marchandises entre les ports de la côte nord du golfe du Saint Laurent. Un jour peut-être ?? Tout à l'heure, à 8 h 20, alors que je prenais mon petit déjeuner et qu'on arrivait à Qeqertarsuaq, le Fram a croisé la route de 3 baleines mais dommage, elles étaient relativement loin et on ne les distinguait à peine, soufflant, sur les photos que j'ai gardées.

9 h à terre, pas de moustiques ;). Nous traversons le village pour nous diriger vers "la vallée des vents" à 2 ou 3 km de celui-ci. Nous commençons par longer la grève... noire car nous sommes sur une île volcanique... Je collecte mon premier échantillon de sable alors qu'à quelques dizaines de mètres du rivage des growlers sont échoués et plus loin de gros icebergs très beaux avec une belle lumière sous un ciel bizarrement couvert : il y a une franche différence entre la partie nord-est dégagée et la partie sud-est nettement plus couverte. Cet endroit de la côte est surnommé "le cimetière des icebergs" : ils arrivent en nombre s'échouer ici et y finissent lentement leur vie d'errance. Nous passons devant l'héliport juste au-dessus de la grève alors que je commence à avoir chaud avec la polaire au-dessus du polo : il fait relativement doux. Nous traversons sur une passerelle le torrent descendant de la "vallée des vents" pratiquement à son embouchure avant de commencer à monter le long de sa rive nord-est. Par endroits, la végétation est pratiquement inexistante mais en général, il y a une espèce de pelouse haute de 10 à 20 cm. Alors que nous gagnons en altitude (100 à 150 m ?), le torrent, lui, a creusé son lit et nous le surplombons de 20 à 30 m quand nous arrivons au but de notre promenade : un confluent où une cascade nous surplombe elle-même de 20 m à gauche et tout un enchaînement de petits sauts à droite avant que l'eau n'atteigne le fond du canyon creusé par le torrent.

11 h 20, je suis sur le chemin de retour : c'est magnifique, tant les paysages terrestres que les icebergs échoués devant le village aux maisons colorées en arrière-plan. En chemin, je ne résiste pas à la tentation d'aller goûter l'eau : hop, chaussures de rando et chaussettes enlevées, j’entre prudemment dans l'eau jusqu'à mi-mollet... Jusque-là tout va bien... Et je ne vais pas plus loin et reste une minute peut-être... Le temps que les jambes retroussées de mon pantalon soient trempées par une vaguelette scélérate... Je ressors, les pieds noirs de sable collé mais en fait, je suis surpris par la rapidité à laquelle ils sèchent... L'air est très sec, il fait doux et je peux me rechausser au bout d'à peine une minute. Il fait chaud en fait et je suis en polo à manches courtes. Mon pantalon va sécher relativement vite. Je continue mon chemin vers le village en longeant la mer sur la grève et suis intrigué par un glaçon de 1 ou 2 kg échoué sur le sable et j'y regarde de plus près à genoux : les grains de sable noir qui le recouvrent sont en fait au fond de petits trous creusés, j'imagine, par la chaleur concentrée par ces grains noirs. Quelques dizaines de mètres plus loin, j'assiste au départ en mer sur fond magnifique d'icebergs de 2 hommes sur leur barque... au moteur hors-bord récalcitrant. L'ambiance de la scène est très très belle et un journaliste allemand est également là pour photographier le départ en mer... je me demande même s'il ne s'agit pas d'une mise en scène pour lui. Ensuite, nous traversons un espace occupé par une dizaine de chiens attachés chacun à sa niche... Je ne suis pas très rassuré mais bon, ils sont calmes. Il y a beaucoup d'hospitalisation au Groenland pour cause de morsure par un chien.

Devant une des maisons, une "pyramide" de 4 ou 5 traîneaux (le plus petit en haut) me fait sourire... J'imagine toute la famille sur la banquise en hiver. Je vais faire un tour dans l'église octogonale du village, simple mais harmonieuse, bien plus petite que celle de Sisimiut. Il s'en dégage aussi une atmosphère sereine.

Ensuite, je vais faire un tour dans la supérette à la recherche d'une moustiquaire de tête. Il n'y a que des bobs à moustiquaire intégrée... mais trop petits pour ma tête. Ce n'est pas tant pour les prochains jours plus au nord que je crains un peu l'assaut des volatiles mais plutôt pour les derniers jours du voyage plus au sud... Je ne trouve pas de moustiquaire mais bon, on est en fin de saison et sans doute, je ne serai pas gêné par les moustiques et ici comme hier à Sisimiut et avant-hier à Kangerlussuaq, je ne cherche pas avec beaucoup de conviction.

Ensuite, je me rends dans le musée établi dans l'ancienne maison occupée par l'administrateur local dans les années 20 avec notamment son "grand" uniforme à broderies et passementeries avec bien sûr... le bicorne indispensable dans ces contrées éloignées de tout. Outre l'uniforme, le musée présente des photos anciennes, des aquarelles, des outils et ustensiles d'autrefois utilisés notamment par l'administrateur pour le travail et la vie quotidienne, des armes. Dans une annexe, sont présentés un kayak en peau, un traîneau, des fanons de baleines, encore des armes à feu et des harpons, etc.. Très intéressante visite.

Ensuite, retour à bord pour déjeuner. Le Fram lève l'ancre à l'heure prévue soit 15 h en direction de l'est afin de contourner l'île de Disko. On nous a recommandé de surveiller la mer car les baleines se montrent souvent dans le secteur. Même les nuages sont très beaux cet après-midi ! Alors que je suis dans un des jacuzzis et qu'on longe la côte sud de l'île, j'ai l'impression d'y voir d'immenses carrières avec notamment sur le bord du plateau un énorme cone vraiment bien régulier comme s'il avait été constitué par les matériaux amenés là par un immense tapis roulant. Il s'agit bien sûr de moraines, proportionnelles à l'immense calotte glaciaire que l'on devine tout en haut de l’île. Vers 17 h, le capitaine "rend visite" à un très bel iceberg plus photogénique que les autres. On tourne autour de celui-ci pendant 20 à 30 minutes.

Vers 18 h 30, j'ai un coup de barre et je vais m'allonger quelques quarts d'heure. Par le sabord de ma cabine, je vois le ciel vers l'est couvert à 60 % environ, des nuages cotonneux.

Après le dîner, je ressors sur les ponts extérieurs pour photographier notamment les icebergs sous la très belle lumière de ce soir dans ce fjord séparant l'île de Disko et la "grande île". De retour à la maison, je remarque une montagne caractéristique sur une photo prise ce soir et qui me "dit vraiment quelque chose";. En cherchant dans mes photos du 20 août, je la retrouve effectivement photographiée plusieurs fois. En effet, cette montagne est juste en face de Qullisaq que nous visiterons dans quelques jours lors de notre retour vers le sud. Ce soir, le village abandonné est à l'ouest, à l'ombre des montagnes de l'île de Disko et je ne le remarque vraiment pas alors que je suis plutôt absorbé par le spectacle du crépuscule sur la rive est du détroit.