21 août : escale à Ilulissat

Traduction d'un extrait du programme : Illulissat signifie les icebergs au Groenland. Vous comprendrez vite le nom de la ville. Au sud de la ville de grands icebergs s'échouent et se regroupent en nombre sur une ancienne moraine [leurs prédécesseurs, en raclant le fond de la mer, ont entassé tels des bulldozers ce talus infranchissable tant qu'ils gardent leur tirant d'eau d'origine. Pour continuer leur route en passant par dessus cette moraine sous-marine, ils doivent donc s'alléger en se fractionnant : voir la photo satellite] . Ces géants de glace proviennent du glacier Sermeq Kujalleq qui progresse d'environ 19 mètres par jour. En raison de son caractère exceptionnel et de la glaciologie Illulissat et l'Icefiord ont été inscrits sur la Liste du patrimoine mondial en 2004. Nous allons y passer la journée afin de profiter des paysages magnifiques. Mais la ville vaut également la visite: vous trouverez les musées, ainsi qu'une grande variété d'expo et boutiques des arts typiques et d'artisanat.

21 août, 9 h 06 à ilulissat par 69° 14' nord et 51° 06' ouest. Nous avons parcouru 2169 milles depuis Kangerlussuaq et 44 milles depuis Eqip Sermia. Il fait 6,3° Celsius, 80 % d'humidité, 1003 hPa, vent de 6,2 noeuds du sud. Ça y est, les écrans d'informations météo et navigation refonctionnent.

Le Fram est au mouillage dans le chenal d'accès au port situé au fond d'une petite anse très étroite mais longue. Sur la rive nord de l'anse on voit les iglous en aluminium de l'hôtel Arctic **** au sommet de la… je ne peux pas trop écrire "falaise" car il s'agit en fait surtout de roches érodées par les glaciers et donc avec une pente relativement douce. Je dois participer à l'excursion en hélicoptère au-dessus des icebergs et du glacier les générant et je débarque donc pour 9 h 30 sur le quai du port… mais… le temps est couvert... j’ai bien vu passer l'hélicoptère avec le premier groupe de la journée au-dessus de nous... mais on nous annonce que notre vol est annulé compte tenu des conditions météo. Si j'avais su ! ! Pour arranger une passagère afin qu'elle puisse être avec son mari pour l'excursion en vedette parmi les icebergs, j'ai échangé ma place au sein du premier groupe qui vient de nous survoler (en fait, ils ne feront pas l'intégralité du programme de vol prévu) pour sa place dans le second groupe cloué au sol... trop gentil sans doute...
Mais vous pouvez voir la video de Danielle qui a eu la chance faire ce vol quelques semaines auparavant.

Je rattrape donc mes co-passagers français pour une balade en ville et en particulier du côté de la maison du pasteur Rasmussen où son fils Knud a passé sa jeunesse. La maison rouge est reconvertie en musée maintenant avec comme dans les autres musées, des costumes, armes, outils mais aussi des portraits, des bustes de Knud Rasmussen. Derrière la petite fenêtre en avancée (une espèce de bow-window) donnant sur la mer et l'église à quelques dizaines de mètres, j'imagine le pasteur lisant sa Bible à la lumière du couchant.

L'église est fermée... dommage ; j'essaie de la photographier avec des linaigrettes en premier plan... aïe mon dos... le sol est humide et pas moyen de poser un genou. Au nord de l'église, l'hôpital peint en rouge est construit sur une petite pointe s'avançant dans la mer entre le port et la petite anse au fond de laquelle est construite l'église. Je m'avance sur les rochers polis et repolis par les glaces en contrebas de l'église afin de me rapprocher de goélands alignés sur un growler. Plus loin, d'autres goélands et mouettes s'en donnent à coeur joie sur les abats que leur jette un pêcheur depuis son petit canot. Là, il est à peu près 11 h 30 et depuis l'entrée de l'enceinte de l'hôpital, je photographie le Fram alors qu'arrive se mettre à couple la vedette à bord de laquelle je partirai cet après-midi à la découverte des icebergs... sous un arc-en-ciel pâlichon... dommage. Il y a pas mal d'entrées et sorties du port de canots occupés par 1 ou 2 pêcheurs et de bateaux un peu plus importants avec 2 à 4 hommes d'équipage. La plupart des canots sont en pêche à quelques centaines de mètres du rivage.

Vers midi, je retourne vers le musée et en photographie cette fois-ci l'extérieur puis vers 12 h 20, je suis tout au fond du port. Alors que j'y arrive, l'équipage d'un bateau d'une douzaine de mètres décharge des sacs en plastique remplis de viande... sûrement de la baleine... je vais plus loin car je ne veux pas avoir l'air de les juger. Autant les Japonais qui s'en vont chasser dans le Grand Sud sous prétexte scientifique me dérangent, autant les Groenlandais avec leurs petits moyens et prélevant juste ce qu'il faut comme depuis toujours ne me gênent pas. Apparemment chaque membre d'équipage part avec son sac de 20 à 30 kilos de viande. Un certain nombre de bateaux de 10 à 15 m sont en effet équipés de canons lance harpon à l'avant et de nids de pie en haut du mât de misaine. Dans le port, il y a aussi des growlers suffisamment gros pour écraser les canots comme des fétus de paille. Amarré au quai, on n'est pas encore à l'abri ici : un growler de plusieurs dizaines de tonnes qui coince votre canot contre le quai ne doit pas faire que des éraflures. Je déambule quelques dizaines de minutes sur le quai, regardant décharger des caisses et des caisses de crevettes cuites à bord puis je rejoins le Fram afin de déjeuner et d'être prêt pour la balade de cet après-midi en vedette à défaut d'hélicoptère ce matin. Mais le ciel est toujours partiellement couvert.

De 13 h 45 de 14 h 10 environ, en attendant de partir en excursion, je suis sur le pont 7 à photographier les bateaux de retour de pêche... et puis aussi les iglous en alu de l'hôtel. 14 h 30, je suis à l'avant de la vedette Naja Araq Ituk : sûrement moins confortable que le salon vitré et même le pont supérieur avec ses bancs mais bon, sûrement meilleur endroit pour la photographie. Nous croisons beaucoup de pêcheurs au travail et notamment un Groenlandais en ciré orange sur son canot mi-orange mi-blanc que j'ai vu en pleins préparatifs tout à l'heure au fond du port. L'orange du ciré et du canot et leur reflet font une très belle photo je trouve alors qu'il est en train de remonter sa ligne et que passe un fulmar.

Les icebergs sont loin d'être uniformément blancs. En fait, je suis un peu déçu : on m'avait tant parlé des icebergs d’ilulissat que je m'attendais à quelque chose d'encore plus grandiose. La lumière, non plus, n'est pas parfaite en permanence et je trouve qu'on a souvent du mal à distinguer les détails de la glace. Par contre, quand le ciel est vraiment bien plombé, on est presque en "noir et blanc" et c'est vraiment pas mal.

Coup de chance, nous croisons la route de 2 jeunes rorquals communs (20 à 23 m pour les adultes) qui nous gratifie de leurs ondulations et de leurs lobtailings (fin du plongeon quand la queue sort de l'eau à la verticale) sur fond d'icebergs. En fait, on croise 3 fois leur route : la seconde fois, on a entendu leur souffle avant de les voir... ça souffle vraiment très fort. Selon les données de mes photos, les rencontres durent de 15 h 49 à 15 h 55 (on ne peut pas les suivre quand elles s'engagent entre 2 icebergs... on doit faire le tour), moins d'une minute à 16 h 04 puis de 16 h 08 à 16 h 12. Le ciel est de plus en plus couvert et apparemment il pleut sur ilulissat : là, sous un ciel vraiment plombé, ce paysage d'eau et de glace est vraiment très beau alors que nous mettons le cap vers le Fram que nous rejoignons à 17 h. A voir aussi la très belle video de Danielle.